Remontons 15 ans en arrière pour
revenir aux prémisses risibles de ma vie romantique. Avant que la
généralisation massive des téléphones portables ne chamboule l'art du
"tu veux sortir avec moi?" timidement décroché à la sortie des cours. Je
vous préviens tout de suite, le récit qui va suivre est loin d'être glorieux...
Acte 2 : La génèse du rateau
En 1999, je n'avais encore jamais vu de téléphone portable. C'est bien simple,
chez moi comme dans 90% des foyers, il n'y avait qu'une seule ligne de
téléphone pour toute la famille. Donc les "tu fais quoi" et
autres "tu dors?" de 2h du mat', on oublie. Pour utiliser le
téléphone il fallait demander l'autorisation aux autres habitants de la maison au cas où l'un d'eux ait un coup de fil plus urgent à passer.
Et comble du fonctionnel pour un ado mal dans sa peau, le téléphone sans fil
ne s'était pas encore démocratisé. Installé en plein milieu du salon à côté de
la télé, ce putain de combiné était rattaché à sa base par un fil en queue de
cochon de 50 pauv' centimètres, t'obligeant à rester agglutiné au receptacle.
Exit l'intimité. Ta
conversation d'ado malhabile, fallait l’assumer debout au milieu du salon. À côté de toute ta famille. Qui n'avait généralement rien de mieux à foutre que de
regarder Question pour un Champion pile à ce moment là, en faisant habilement semblant de ne pas écouter ta conversation.
Un week-end, las de me lamenter sur ma condition d'adolescent
frustré, et puceau -est-ce utile de la préciser- je me suis dit qu’il était
grand temps pour moi de commencer à avoir un semblant de vie sentimentale.
Je pris la liste de tous les numéros d'élèves de ma classe pour choper le tel de E., une de mes fixations de
l'époque. C'était évidemment un numéro de téléphone fixe, puisque -dois-je le rappeler- personne n'avait de portable en ces temps-là.
Ma voix se mit à trembler lorsque je tapota le numéro avec mes doigts maigres et moites.
Respiration.
Ma voix se mit à trembler lorsque je tapota le numéro avec mes doigts maigres et moites.
Respiration.
"ALLO !". Le grondement rauque et viril qui me répondit contrastait avec la douce mélodie fluette et sensuelle à laquelle je m'attendais. OK, il fallait en premier lieu passer la barrière du père de famille. Dont l'organe affirmé me paraissait une ultime humiliation à mon timbre incertain. En ces temps douloureux, ma voix alternait encore sans prévenir entre intonations gutturales mal maitrisées et soubresaut sur-aigus irritants, pénible symptôme de ma mutation hormonale inachevée.
Après avoir bredouillé un obscur prétexte d'exposé bidon en binôme avec sa chère et tendre blondinette je pus enfin parler à l'objet de mes fantasmes. Et mettre en marche mon audacieux plan de séduction.
- "..."
- "..."
Ce qu'il s'est passé ensuite? Bien que je peine à me rappeler précisément de la teneur de cette conversation sulfureuse, une vision me revient systématiquement en mémoire à chaque fois que je repense à cette instant suspendu.
Après avoir bredouillé un obscur prétexte d'exposé bidon en binôme avec sa chère et tendre blondinette je pus enfin parler à l'objet de mes fantasmes. Et mettre en marche mon audacieux plan de séduction.
- "..."
- "..."
Ce qu'il s'est passé ensuite? Bien que je peine à me rappeler précisément de la teneur de cette conversation sulfureuse, une vision me revient systématiquement en mémoire à chaque fois que je repense à cette instant suspendu.
Cela constitua le début d’une très belle collection je n’ai eu cesse
d'agrémenter de nouvelles pièces de choix au fil des années. Alors oui. Je
n'aurais pas été contre vivre ces scènes derrière un écran moelleux plutôt que de me
faire lacérer la gueule par la fille devant ses parents. Mes parents. Et ma soeur
qui regardait également le 4 à la suite.
Bordel, je peux te dire que j'te l'aurais
payé, moi, l'abonnement Tinder !
|